Inelfe : INterconnexion électrique France-Espagne

Une nouvelle ligne France-Espagne 320 kV DC porte la capacité d’échanges de 1 400 à 2 800 MW entre les deux pays.
Cette ligne électrique qui passe sous les Pyrénées a nécessité d’utiliser la technologie du courant continu et de recourir à des solutions innovantes.

Tracé de la ligne 64,5 km

Les acteurs du projet

– RTE – Réseau de Transport d’Électricité
En tant qu’opérateur du réseau de transport d’électricité à haute tension (HT), RTE achemine l’électricité entre les fournisseurs d’électricité (français et européens) et les consommateurs.
– REE – Red Eléctrica de España
Fondée en 1985, Red Eléctrica de España est l’entreprise responsable de l’exploitation du système électrique et du réseau de transport de l’énergie électrique haute tension en Espagne.
– Inelfe (INterconnexion Électrique France-Espagne) est une société mixte constituée depuis le 1er octobre 2008 à parts égales par les entreprises gestionnaires des réseaux électriques espagnol et français, REE (Red Eléctrica de España) et RTE (Réseau de Transport d’Électricité), à la suite de l’accord de Saragosse entre les gouvernements français et espagnols le 27 juin 2008, et conformément aux recommandations préalables du coordinateur européen Mario Monti.

L’interconnexion France-Espagne va accroître les possibilités d’utiliser la complémentarité des bouquets électriques français, espagnol et plus largement européen.
Cette complémentarité offre de la souplesse et de la flexibilité pour gérer les pointes et les creux de consommation d’une part, et les variations de production d’autre part.
En effet, loin d’être figés, les déséquilibres électriques en Europe peuvent évoluer au cours d’une journée, au fil des saisons ou bien dans l’année.
A ce titre, la pointe de consommation en France (19h) ne se produit pas au même moment qu’en Espagne (22h).
De même, les vagues de froid n’affectent pas en général les deux pays de façon simultanée.
Chaque pays peut ainsi faire bénéficier son voisin de sa production électrique disponible, au moment où celui-ci peut en avoir besoin.
En mutualisant davantage leurs moyens de production d’électricité, la France et l’Espagne se trouvent solidairement plus efficaces au quotidien pour tirer un meilleur parti de leurs bouquets de production électrique et faire face aux éventuels incidents sur leurs réseaux, réduisant ainsi les besoins de construire des moyens de production supplémentaires.

La nouvelle ligne électrique entre la France et l’Espagne va accélérer l’intégration des énergies renouvelables dans le réseau électrique européen.
L’Espagne bénéficie de conditions favorables au développement de l’éolien et du photovoltaïque.
Elle est le premier producteur d’éolien en Europe (avec 54 TWh en 2013) et dispose d’un parc d’énergies renouvelables (éolien, solaire, hydraulique et biomasse) représentant 30 GW, soit une puissance équivalente à la consommation espagnole en heures creuses.

L’économie d’émissions de CO2 ainsi réalisée est évaluée à 1 million de tonnes par an (source : ENTSO-E). En ce sens, la ligne France-Espagne va contribuer à la réalisation des objectifs « Énergie Climat » fixés par l’Union européenne pour 2030 :
Réduire de 40% d’émissions de CO2 par rapport à 1990, améliorer de 27% d’efficacité énergétique par rapport à 1990 et porter à 27% la part des énergies renouvelables dans la consommation finale d’énergie.

L’interconnexion France-Espagne établit ainsi aujourd’hui 3 records du monde

1. Record mondial en souterrain à ce niveau de puissance
En reliant les communes de Santa Llogaia (près de Figueres en Espagne) et Baixas (près de Perpignan), distantes de 65 km (32 km côté espagnol et 33 km côté français), c’est l’interconnexion électrique, à ce niveau de puissance (2 000 MW), la plus longue du monde. Celle de Tokyo, jusqu’alors détentrice de ce record, atteint une longueur de 40 km.

2. Record mondial de puissance : 2 000 MW
C’est la 1ère ligne électrique à ce niveau de puissance en courant continu avec la technologie VSC (Voltage Source Converter).
Pour transporter l’électricité à ce niveau de puissance en souterrain sur une telle distance, la ligne doit fonctionner en courant continu.
Pour injecter ensuite cette électricité sur les réseaux français et espagnol, qui fonctionnent en courant alternatif, il a fallu créer des stations de conversion à chaque extrémité de la ligne.
Pour cela, la dernière technologie (VSC) a été utilisée pour ces stations de conversion et le niveau de puissance atteint constitue le franchissement d’un palier technologique, amené à se développer ailleurs dans le monde.

La technologie VSC a été retenue pour les avantages qu’elle procure dans l’exploitation du réseau (rapidité d’inversion des flux électriques, maintien de la tension en France et en Espagne, pilotage plus souple des échanges).

3. Record mondial du niveau de tension : 320 kV
Jamais des câbles à isolation sèche, de technologie XLPE (isolation en polyéthylène réticulé) n’avaient été utilisés à un tel niveau de tension en courant continu.
Ces nouveaux câbles développés spécifiquement pour cette ligne, plus légers que les câbles à huile isolante et présentant une grande fiabilité, permettront d’éviter les éventuels rejets d’huile en cas d’incidents.
L’interconnexion de Transbay à San-Francisco détenait jusqu’alors le précédent record avec un niveau de tension de 200 kV.

Vue intérieure du tunnel sous les Pyrénées (8,5 km) avec les câbles installés sur les parois

C’est la première fois en Europe qu’une liaison à courant continu fonctionne parallèlement et simultanément avec des lignes aériennes en courant alternatif.
Pour réussir ce défi technique et maîtriser la complexité de ces nouveaux équipements techniques (stations VSC), RTE a créé le premier laboratoire en Europe destiné à simuler en temps réel les interactions entre le réseau alternatif et les stations de conversion à courant continu.
Convertisseur VSC-MMC avec transmission tension de ± 320 kV DC (type de semi conducteurs IGBT).
Réseau alternatif 400 kV, 50 Hz. Puissance 2 x 1 000 MW.

Ce laboratoire, qui réunit à la fois des calculateurs temps réel très puissants, les logiciels de simulation les plus performants et une équipe d’ingénieurs et de chercheurs universitaires de haut niveau, va permettre de simuler le fonctionnement et les interactions de ces différents équipements, d’en analyser et corriger les éventuels dysfonctionnements. Il permettra aussi d’appuyer les interventions de maintenance ultérieure.

Moyens techniques

– La traversée des Pyrénées par le massif des Albères a nécessité le creusement d’un tunnel long de 8,5 km et d’un diamètre de 3,5 m dans lequel des véhicules électriques automatisés de maintenance peuvent circuler. Cette galerie a été creusée au moyen de deux tunneliers progressant à la rencontre l’un de l’autre.

– De part et d’autre des Pyrénées, des tranchées ont été creusées sur 56 km (26 km côté français et 30 km côté espagnol) pour accueillir les câbles.
Traversant 26 communes, ces tranchées ont donné lieu à 37 forages dirigés, dont certains ont pu atteindre 700 m de profondeur. Ces forages dirigés ont permis de franchir des obstacles tels que l’autoroute, des voies ferrées, des fleuves comme la Têt et le Tech, et de préserver les sites naturels tels que la zone Natura 2 000 au bord du Tech, ou un site archéologique en Espagne.

260 km de câbles ont été installés.
L’interconnexion se compose sur toute sa longueur de 2 liaisons comportant chacune 2 câbles. Ce sont donc 4 câbles qui ont dû être déployés sur l’ensemble de la ligne.
Cette étape finale a nécessité de mobiliser du matériel spécifique.
Les 140 tourets qui ont servi à transporter les câbles jusqu’au chantier (jusqu’à 2 300 m par touret) sont en effet les plus gros jamais utilisés (entre 50 et 80 tonnes chacun, contre 30 à 40 tonnes habituellement).
Ils ont nécessité un transport par convoi exceptionnel depuis l’usine de fabrication de Sens (89) jusqu’au chantier.

181 engagements environnementaux ont été pris durant toute la concertation, et ont fait l’objet d’un suivi par des Comités de suivi des travaux pilotés par la préfecture des Pyrénées-Orientales.

Les grandes étapes du projet

Les partenaires industriels

Eiffage :
– Creusement de la galerie technique, associé à l’entreprise espagnole Dragados.

SAG THEPAULT :
Travaux de génie civil entre les deux postes de conversion, associé avec l’entreprise espagnole Ferrovial Agroman.

Prysmian Group :
– Fabrication du câble 1×2500 mm² 320 kV HVDC .
– Fabrication des accessoires (jonctions et extrémités) 320kV HVDC
– Fabrication des câbles Fibre Optique et accessoires.
– Transport et déroulage des câbles.
– Montage des accessoires des câbles de puissance et des câbles Fibre Optique.
– Essais de mise en service des 2 liaisons HVDC et Fibre optique (48 FO et DTS).

Siemens :
– Réalisation clé en main des stations de conversion en courant continu en France (Baixas) et en Espagne (Santa Llogaia.), incluant : les convertisseurs HVDC-Plus, les disjoncteurs courant continu et courant alternatif, les transformateurs, la commande et protection, le génie civil et tous les équipements auxiliaires électriques et mécaniques.

Vidéos



Manuel Valls, Premier ministre français, et Mariano Rajoy, Président du Gouvernement espagnol, ont inauguré le 20 février 2015, à Montesquieu-des-Albères (Pyrénées-Orientales), la nouvelle interconnexion électrique entre la France et l’Espagne, en présence de Miguel Arias Cañete, Commissaire européen au Climat et à l’Energie, de Dominique Maillard, Président du Directoire de RTE, et de José Folgado Blanco, Président de REE.