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Stockage de l’énergie électrique
Si la plupart des énergies primaires (gaz, pétrole ou charbon) se stockent facilement, il est en revanche assez compliqué de stocker l’électricité en grande quantité.
Il est toutefois possible de la convertir en d’autres formes d’énergies intermédiaires et stockables (potentielle, cinétique, chimique ou thermique).
Pourquoi stocker l’électricité
La demande croissante en électricité, notamment lors des périodes de pointes de consommation rendent plus difficile la stabilisation des réseaux et en danger l’équilibre du système électrique (l’offre et la demande).
De plus les EnR (énergies renouvelables) sont des énergies intermittentes (éolienne, photovoltaïque…).
Stocker c’est éviter le “blackout” (une panne de courant à large échelle).
En France, le stockage est considéré comme un élément clef à prendre en compte dans les années à venir : la DGEC (Direction Générale de l’Énergie et du Climat) parle d’un « vecteur énergétique très prometteur dans la décarbonisation des usages énergétiques » et de nouvelles solutions de stockage sont expérimentées dans les différents démonstrateurs des smarts grids : Venteaa, Nice Grid, GreenLys, etc…
Les différentes technologies de stockage de l’électricité
Les solutions de stockage d’énergie se divisent en plusieurs catégories :
– Mécanique (barrage hydroélectrique, Station de transfert d’énergie par pompage (stEP), stockage d’énergie par air comprimé (CAES), volants d’inertie.
– Électrochimique (piles, batteries,hydrogène).
– Électromagnétique (bobines supraconductrices, supercapacités).
– Thermique (chaleur latente ou sensible).
Stations de transfert d’énergie par pompage (stEP)
Le pompage-turbinage est une technique de stockage qui repose sur le principe de pomper de l’eau pour la stocker dans des bassins d’accumulation lorsque la demande d’énergie est faible, c’est le pompage. Puis utiliser cette eau plus tard pour produire de l’électricité lorsque la demande est forte, c’est le turbinage.
On distingue deux types de pompage :
– Les stations de pompage d’apports : elles permettent de remonter via des pompes un volume d’eau entre son propre réservoir et le réservoir supérieur d’une chute turbinage. Les eaux turbinées proviennent ainsi des apports gravitaires et des apports de la station de pompage.
– Les stations de transfert d’énergie par pompage (STEP) : elles sont caractérisées par un fonctionnement en cycles pompage-turbinage entre un réservoir inférieur et un réservoir supérieur, grâce à des turbines-pompes réversibles. Le pompage peut être « mixte » (les eaux turbinées proviennent des apports gravitaires et des apports de la station de pompage) ou « pur » (les apports naturels au réservoir supérieur sont négligeables).
Groupe turbine-alternateur :
Le rôle de la turbine est de transformer l’énergie de l’eau, de la vapeur ou du vent en énergie mécanique, de manière à faire tourner un alternateur. L’alternateur, à son tour, transforme l’énergie mécanique en énergie électrique. Dans le cas des centrales hydroélectriques, on appelle groupe turbine-alternateur la turbine et l’alternateur qui fonctionnent ensemble.
Les stEP sont également installées en façade maritime, avec la mer comme retenue inférieure et une retenue amont au sommet d’une falaise ou constituée par une digue.
Stockage d’énergie par air comprimé (Compressed Air Energy Storage – CAES)
Les installations de stockage d’énergie par air comprimé consistent, en utilisant l’électricité disponible à bas coût en période de faible consommation, à stocker de l’air dans des cavités souterraines comme des cavernes souterraines ou d’anciennes mines grâce à un compresseur. Au moment de la pointe de consommation, cet air comprimé est libéré pour faire tourner des turbines qui produisent ainsi de l’électricité.
L’efficacité énergétique est médiocre, car la compression s’accompagne d’un échauffement du gaz, sauf si on récupère la chaleur produite (cogénération air comprimé + chaleur).
Stockage inertiel
L’électricité fait tourner à très grande vitesse une masse autour d’un axe cylindrique dans un caisson isolé. L’énergie cinétique entraînée par la rotation du cylindre peut ainsi être conservée. Cette énergie est ensuite récupérée sous forme d’électricité grâce à un alternateur (principe de la dynamo).
Le frottement doit être minimal pour éviter les déperditions. C’est possible en plaçant le volant dans le vide et sur des paliers à lévitation magnétique, systèmes rendant la méthode très couteuse. De plus grandes vitesses de volant permettent une plus grande capacité de stockage mais exigent des matériaux ultra résistants pour résister à l’éclatement et éviter les effets explosifs d’une panne du système, au cours de laquelle l’énergie cinétique de rotation serait convertie en énergie cinétique de translation (autrement dit, le disque se transformerait en projectile…)
En pratique, ce type de stockage est d’un usage très courant mais il se limite principalement aux volants d’inertie au sein des moteurs et des appareils de production d’énergie. Ils y opèrent un lissage à très court terme pour régulariser la fourniture d’énergie.
Stockage d’énergie grâce à l’hydrogène
L’électricité va permettre de produire, via un électrolyseur, de l’hydrogène. Le gaz est ensuite stocké soit sous forme liquide, solide ou gazeuse avant d’être consommé dans une pile à combustible. Recombiné à l’oxygène il va ainsi produire de l’eau et de l’électricité.
Pendant les périodes de faible consommation d’électricité, l’électrolyseur utilise de l’électricité pour décomposer de l’eau en oxygène et en hydrogène, selon l’équation 2 H2O= 2H2 + O2. Cet hydrogène est ensuite comprimé, liquéfié ou stocké sous forme d’hydrure métallique.
Ensuite, il existe trois moyens différents pour réinjecter de l’électricité sur le réseau à partir de l’hydrogène stocké :
– Alimenter une pile à combustible ;
– Synthétiser du gaz naturel selon le procédé de la méthanisation. Alimentation d’une centrale à gaz.
– Utilisation de l’hydrogène directement dans une centrale à gaz spécialement conçue à cet effet.
L’intérêt de ce type de système réside :
– Dans le stockage et le transport, que ce soit sous forme liquide ou gazeuse.
– La capacité en énergie est dimensionnée par la taille des réservoirs et peut aller de plusieurs heures à plusieurs jours en fonction de l’application du système (secours, décalage de consommation).
Batteries électrochimiques
Le stockage d’électricité s’effectue grâce à des réactions électrochimiques qui consistent à faire circuler des ions et des électrons entre deux électrodes.
Les composants chimiques peuvent être différents d’une technologie à une autre, créant ainsi une grande variété de batteries.
Il existe ainsi des batteries plomb-acide, nickel-cadmium, nickel-hydrure métallique, lithium-ion, lithium-polymère, lithium-air, sodium-soufre, chlorure de sodium etc…
Un système d’électronique de puissance (onduleur) convertit le courant continu des batteries en courant alternatif à la tension, la fréquence et la puissance voulues. Ce système est aussi utilisé dans le sens inverse pour recharger les batteries (chargeur).
Dans les systèmes de stockage par batteries électrochimiques, les assemblages de batteries sont conçus pour fournir la puissance et la capacité en fonction des usages (par exemple stabilisation des réseaux, alimentation de secours). La capacité de stockage de puissance et d’énergie varie en fonction des technologies. Les principaux avantages des batteries sont leur flexibilité de dimensionnement et leur réactivité.
Supercondensateur
Un supercondensateur est un condensateur de technique particulière permettant d’obtenir une densité de puissance et une densité d’énergie intermédiaire entre les batteries et les condensateurs électrolytiques.
Ces composants permettent donc de stocker une quantité d’énergie intermédiaire entre ces deux modes de stockage, et de la restituer plus rapidement qu’une batterie.
Le supercondensateur est constitué de deux électrodes poreuses, généralement en charbon actif et imprégnées d’électrolyte, qui sont séparées par une membrane isolante et poreuse (pour assurer la conduction ionique). La couche double électrique se développe sur chaque interface électrode-électrolyte, de sorte que l’on peut voir schématiquement un supercondensateur comme l’association de deux condensateurs en série, l’un à l’électrode positive et l’autre à l’électrode négative. La mobilité des anions, beaucoup moins hydratés, est plus grande que celles des cations. Ils se déplacent plus facilement dans la structure du charbon actif et forment une couche d’épaisseur plus faible, de sorte que l’on observe une valeur de capacité d’anode supérieure à celle de cathode. En raison des lois d’association des condensateurs, la capacité de l’ensemble en série est toujours inférieure à la plus faible de ces deux capacités. C’est aussi pour cette raison que le supercondensateur est polarisé, chaque électrode étant optimisée soit pour des anions, soit pour des cations.
Stockage électromagnétique (SMES : Superconducting Magnetic Energy Storage)
Ce système permet de stocker de l’énergie sous la forme d’un champ magnétique créé par la circulation d’un courant continu dans un anneau supraconducteur refroidi sous sa température critique. L’électricité peut ensuite être récupérée dans un laps de temps très court.
Un système SMES typique comprend trois parties :
– Une bobine supraconductrice.
– Un système de conversion de l’énergie.
– Une réfrigération cryogénique.
Une fois la bobine supraconductrice chargée, le courant ne va pas diminuer et l’énergie magnétique peut être stockée indéfiniment.
L’énergie stockée peut être délivrée au réseau en déchargeant l’anneau.
Le système de conversion de l’énergie utilise un onduleur/redresseur pour transformer le courant alternatif en courant continu ou convertir le continu en alternatif.
L’onduleur/redresseur génère 2 à 3 % des pertes d’énergie. Les pertes du SMES sont les plus faibles comparés à d’autres techniques de stockage. Avec un rendement excédant 95%, les systèmes SMES sont très efficaces, mais encore très coûteux.
Stockage thermique
– Le stockage par chaleur sensible qui consiste à chauffer un fluide caloporteur ou un solide. La chaleur est ensuite récupérée en chauffant un autre fluide. C’est le principe du ballon d’eau chaude, couplé à un panneau solaire thermique. C’est aussi tout simplement le cas d’une pierre posée près d’une cheminée. Une fois qu’elle a emmagasiné la chaleur, elle peut être déplacée et céder sa chaleur.
– Le stockage de chaleur par changement de phase grâce à l’utilisation de matériaux dont la chaleur va entraîner le passage d’un état solide à un état liquide. C’est le cas, par exemple, de la paraffine dont la température de fusion est proche des 70°C. Elle restitue cette chaleur lorsqu’elle repasse à l’état solide.
– Le stockage de chaleur par réaction chimique qui consiste en l’utilisation d’une réaction chimique réversible qui a besoin d’un apport de chaleur dans un sens (endothermique) et dégage de la chaleur dans le sens opposé (exothermique). Parmi les réactifs envisagés, la chaux. La chaleur apportée permet de l’assécher (c’est-à-dire retirer l’eau du mélange). La chaux sèche est ensuite conservée à l’abri de l’humidité. Lorsqu’elle est ré-humidifiée, se produit alors un dégagement de chaleur qui peut être utilisé notamment dans l’habitat. La stabilité de ce système peut permettre un stockage saisonnier.
Le stockage de chaleur dans les ballons d’eau chaude sanitaire mobilise aujourd’hui un parc de plusieurs millions d’installations, ce qui représente un appel de puissance de plusieurs gigawatts. Cet appel de puissance est prédictible et commandable, ce qui permet de décaler cet appel de puissance de manière programmée.
Conclusion
Certaines technologies, comme les STEP, sont aujourd’hui matures, la plupart des technologies existantes nécessitent encore des améliorations afin de les rendre plus efficaces et compétitives en prenant en compte :
– L’utilisation des matériaux les moins coûteux.
– La réduction de la quantité de matériaux pour économiser les ressources naturelles.
– La recherche de couples chimiques qui offrent de meilleures performances.
– La diminution des pertes et donc l’augmentation du rendement.
– Des coûts d’installation et de maintenance faibles.
– Les impacts environnementaux.
– Une combinaison entre la production ENR et le système de stockage.
Il faut rendre donc ces technologies polyvalentes. L’intérêt économique d’un système de stockage augmente si son utilisation répond à plusieurs besoins, par l’intégration des ENR et le soutien à la qualité du réseau. Il s’agit alors de trouver le bon compromis.